11 mars 2010

Témoignage - La vie de Pierre

Mars 2010
Dans quelques jours, Pierre aura 4 ans.On a diagnostiqué en aout 2009 après 1 an de recherche et avec beaucoup de difficulté, de l' HYPERINSULINISME, suite à des manifestations d' hypoglycémie depuis l' age d' environ 14 mois.Il n' y a eu aucun signe remarquable de cette maladie avant cette période.
Pierre était un gros bébé à la naissance( 14 jours avant terme ), plus de 4 kg et tout s' est bien passé la première année de sa vie.Pendant cette période, il a bien grandi et grossi comme un bébé ordinaire et avait un appétit féroce.Je me souviens l' avoir allaité pendant des heures et des heures.Tout a commençé quand vers l' age de 14 mois, j' ai remarqué des faiblesses le matin avant le biberon, comme s' il dormait debout avec les paupières qui se ferment et le regard qui part pendant une à deux secondes. Cela arrivait de temps en temps, pas tous les jours et frequemment alors que les mois passaient.Avant ces signes, Pierre manifestait sa très grande faim le matin, il fallait vite lui donner le biberon dès qu' il était réveillé, probablement qu' il était déjà en hypoglycémie sans que nous ne le sachions.Mais rien n' a été fait malgré le fait que je signale ces phénomènes à plusieurs reprises à son pédiatre.Et oui, Pierre était un petit costaud, grand et fort, normal qu' il ait faim et qu' il ait de l' appétit ! On en vient à douter et à se dire qu' on est une mère trop inquiète.Mais c' est faux, il faut écouter ses intuitions de maman et de papa, elles sont toujours révélatrices.
En juillet 2008, âgé de 2 ans passé, Pierre s' est effondré de sa chaise le matin au petit déjeuner: il est juste tombé, il n' a pas perdu connaissance.Nous avions également remarqué qu' il chutait parfois dans le couloir le matin au réveil et que sa démarche n' était pas toujours stable, comme une personne un peu ivre. Prise de sang à jeun le matin : glycémie à 0,4 g/l puis 1 heure après le petit déjeuner à 0,49 g/l. Il a alors subi toute une batterie de tests pour passer en revue toutes les hypothèses permettant d' expliquer les hypoglycémies.Le résultat tombe : il semblerait que ce soit un déficit en hormone de croissance. Pour le moins surprenant alors que Pierre avait une courbe de croissance exceptionnelle et que le déficit en GH ( growth hormone ) se manifeste d' abord par un retard statural, ce qui n' était pas son cas. Nous avons fait un test hospitalier de stimulation de la GH qui s' est avéré positif: Pierre ne fabriquait plus d' hormone de croissance. Cette dernière étant hyperglycémiante, son absence pouvait expliquer les hypoglycémies, mais le cas restait très rare.Nous avons donc commencé en octobre 2008 des injections quotidiennes d' hormone de croissance le soir, à une dose normale, puis nous avons augmenté progressivement le dosage, les hypoglycémies ne s' arrêtant pas et les malaises survenant alors de manière anarchique à n' importe quel moment de la journée. Pas de régime alimentaire spécial prescrit si ce n' est du fractionné et des féculents. En parallèle, un IRM de son hypophyse n' a révélé aucune anomalie permettant d' expliquer l' absence de sécrétion de GH. Les médecins ont prescrit de l' hydrocortisone pour enrayer les hypoglycémies et ont augmenté la dose de GH à 3 fois la dose normale...C' est au début de cette même période de bilans hospitaliers que Pierre s' était arrêté de grandir, alors les injections d' hormone ont fait leur effet et lui ont permis de rattraper sa courbe.Malheureusement, les symptômes des hypoglycémies ( malaises ) ont alors disparu. Nous croyions donc que le problème était réglé et puis nous avons vu que sa glycémie continuait de descendre en dessous de 0,5 g/l dans la journée. Bref, Pierre a été vu par un spécialiste du métabolisme et par un endocrinien dans un grand hôpital régional et nous avons recommencé les recherches : bilan métabolique, recherche de déficit enzymatique, avec des épreuves de jeun éprouvantes. Et rien...si ce n' est des traces d' insuline détectées en état d' hypoglycémie alors qu' il n' y a pas lieu d' être.Et là, j' ai entendu le mot HYPERINSULINISME. Pierre a passé une échographie du pancréas qui n' a révélé aucun adénome sur la partie visible du pancréas. Les medecins sont partis sur une forme diffuse de l' hyperinsulinisme.Nous sommes rentrés à la maison avec un lecteur glycémique pour lui faire des dextros. A ce moment là, il semblait difficile de croire que Pierre ait 2 maladies rares, déficit total en GH+, hyperinsulinisme. Les médecins pensent que le déficit en GH est une conséquence de l' hyperinsulinisme et que si l' on traite le dernier, le premier se rétablira...
Décision est prise de baisser progressivement le dosage de GH et de commencer une épreuve thérapeutique avec le proglycem ( diazoxide ) en aout 2009, d' abord 50 mg matin et soir pendant une semaine puis 100 mg matin et soir. Le 3 septembre 2009, nous avons arrêté les injections d' hormone de croissance. Pendant la courte période ou il a eu GH +proglycem, il avait une glycémie normale entre 0,8 et 1,2.Ce fut la seule période (zen ) .Car, avec l' arrêt de la GH, la glycémie a recommencé à chuter.Pierre est rentré à l' école, son rythme de vie a également changé. Les hypoglycémies sont revenues, le matin et en fin de matinée surtout. Pierre ne fait pas à proprement parler de malaise, il supporte des glycémies à 0,45g/l mais présente tous les symptômes d' un enfant fatigué : manque d' énergie, pâleur, cernes. Pierre est un petit garçon plus fragile que les autres, qui se fatigue plus vite , qui dort beaucoup, qui craint le froid etc...Nous espérions mieux de ce médicament.
En décembre il a été mesuré, il a pris 3 cm, il semblerait donc que le problème de GH soit derrière nous mais c' est à suivre avec les résultats de ses analyses.
Face aux hypoglycémies récurrentes, nous avons pris contact avec l' hopital Necker pour un second avis. Le diagnostic d' hyperinsulinisme a été confirmé, le déficit en GH semble écarté, la forme diffuse semble retenue aussi. Afin d' éviter les hypoglycémies les plus fréquentes de la journée, le dosage du proglicem est passé à 3 prises matin, midi et soir, 50 mg chacune, puis 75 mg devant la résistance des hypoglycémies.
Aujourd' hui, malgré le traitement, Pierre fait toujours des hypos, tous les jours.Il est limite au réveil et malgré tout ce qu' il peut ingérer le matin au petit déjeuner et dans la matinée, sa glycémie chute en fin de matinée, à des horaires variables selon les jours et selon ses activités. Il a très peu d' appétit, ce qui ne simplifie pas le problème et d' après ce que j' ai compris, ce qui semble lié à la maladie et au traitement.Nous l' obligeons donc à manger un encas à 10 heures à l' école et à reprendre un peu de sucre à 11 h 30 avant de passer à table à 12 h. L ' après midi et le soir, il n' y a en général pas d' hypoglycémie. Pierre doit retourner régulièrement à l' hôpital pour faire des bilans. La questions qui se pose aujourd' hui est de maintenir ce traitement limite ou de passer à la sandostatine.Nous ne savons pas ce qui sera décidé.
Comme il s' agit d' une maladie génétique, nous surveillons aujourd' hui sa petite soeur( 2 ans ) en lui faisant des dextros de temps en temps. Pour l' instant, tout va bien.
Le plus compliqué dans tout cela, c' est la gestion des hypoglycémies. Parfois Pierre est très dynamique, on aurait tendance à ne pas s' inquiéter alors que son sucre est en réalité très bas; parfois, il est pâle et cerné mais son sucre va bien. Parfois il mange tout ce qu' il faut et il fait quand même une hypo après, parfois il ne mange rien, on s' inquiète mais tout va bien.
En dépit des contraintes liées à l' hospitalisation et à son manque d' appétit, Pierre est un petit garçon comme les autres, qui est heureux de vivre, va à l' école le matin, à la piscine, à la gym, à la montagne...Il vit comme les autres enfants de son âge, il se dépense physiquement mais moins longtemps que les autres.Le tout est de prendre des précautions et d' avoir toujours de quoi lui donner du sucre, en particulier avant et après une activité physique.

1 commentaire: